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sur le chemin

15 mai 2007

pour satya

Satya

je t'envoie ce message, je ne sais pas si tu l'auras, je ne sais pas si tu le liras, mais il fallait que je t'écrive, il le fallait. je ne savais pas où, j'ai fini par trouver ce site, je me trouve très bête de faire ça, de t'écrire ici, comme ça, j'ai l'impression d'être le sale monsieur qui se permet trop de choses, qui n'a pas compris que sa route doit continuer, qu'il ne faut pas trop penser, celui qui n'a rien compris.
depuis mon départ de rouen les choses sont devenues plus graves pour moi, j'ai perdu mon statut d'intermittent du spectacle, je n'ai pas le nombre d'heures necessaire, je ne peux plus prendre la route, je vis seul là où ma caravane se trouve, je n'ai plus de travail, et c'est dur. je n'aime pas dire que c'est dur, je n'aime pas ça, je ne veux pas me plaindre, je ne veux pas faire pitié, mais là, cette fois, c'est trop.
je n'aime pas dire d'où je viens, ni dire que  les fantomes ne me font plus peur parce qu'ils ont un visage que je connais depuis longtemps, trop longtemps. je me bats tous les jours depuis des années pour aller bien, pour prendre soin de moi, et je vais bien, ma vie est une belle vie, je rêve beaucoup, j'imagine, et je construis plein de belles choses pour moi, qui me font du bien, qui me rendent souvent heureux.
j'ai vécu. beaucoup.
Quand j'étais petit ma première amoureuse est morte au moment de noël, j'ai mis 15 ans à m'en remettre,  pour finalement rencontrer quelqu'un qui un jour m'a abandonné comme on abandonne un animal sur la route, alors que nous devions partir faire le tour du monde, avoir des enfants, vivre heureux. Je ne l'ai plus revu, plus jamais parler, plus jamais comprise. Pendant de long mois j'ai  eu en moi tout ce silence qui m'a tant fait de mal.

J'ai fait des milliers de kilomètres pour accepter, pour ne pas tomber par terre et refuser de ne plus jamais avoir le sourire. Et j'ai réussi, j'ai réussi à ne pas vouloir tout arrêter, à ne pas disparaitre de cette planète. je vis, j'aime cette vie, je la porte seul, et je n'ai aucune haine, aucun regret. juste cette envie de vivre heureux encore et encore.
j'ai fait beaucoup de rencontres, beaucoup de très belles personnes, qui m'ont donné plein de beaux souvenirs, plein.
Et puis un beau jour alors que je n'avais en tête  que de créer ce spectacle des "passagers", te voilà sur ma route, et    je n'arrive pas, depuis, à la continuer comme avant. je déteste cet écran plat d'ordinateur, ces mots, ce téléphone portable, le virtuel, le froid, la nostalgie, les grandes déclarations sans fin, les drames, et pourtant, je suis là, à te laisser ce message sans fin comme un con.
je suis nomade depuis longtemps, je suis libre depuis toujours. je n'aime pas promettre de grandes choses que la vie essaie toujours de détruire au bout du compte, j'aime vivre le présent, simplement, sincèrement. et pourtant, depuis que je t'ai vu remonter cette escalier, cette nuit, à rouen, j'ai le ventre qui crie, j'ai la tête ailleurs, j'ai tout le temps faim, j'ai envie de courir partout encore plus, j'ai envie de savoir qui était vraiment cette personne, toi, que je n'arrive pas à laisser partir, comme si de rien n'était, comme s' il fallait reprendre la route et laisser l'autre devenir un bon souvenir. Tu dois me trouver complètement fou, je ne le suis pas, je vis, tout simplement.
je sais.
je sais que je ne dois certainement rien attendre, rien esperer, tu ne dois certainement ne pas aimer ce que je suis en train de faire, tu as une vie, ailleurs, ta vie.
depuis toujours je m'interdis de ne pas dire ce que je ressens , même si c'est trop pour les autres, même si je me sens ridicule de le faire, là. je ne peux pas faire semblant, je ne peux pas garder le silence, parce que j'aimais m'asseoir à tes côtés, parce que j'aimais te raconter  des choses, te répondre, t'écouter, apprendre un peu plus à te connaitre, si peu, et pourtant. Parce que très longtemps je vis sans avoir eu ça au fond de moi, ces toutes petites choses de rien du tout qui boulversent, et que l'on trouve chez une autre. Et pas ailleurs. Non. Pas ailleurs.
Ce n'était peut être qu'un moment parmis tant d'autres, quelque chose de dérisoire, sans grande importance, seulement moi, moi, ça me reste gravé dans le ventre.
je ne suis pas doué pour toutes ces choses là, et je suis resté peut être trop longtemps solitaire pour réussir à dire ce que je ressens.
je crois en des choses belles et simples, en une certaine forme de folie, en l'être humain, en ce que je ressens.
je n'ai pas tout dit, je ne dirai pas tout.
je suis capable de rêver encore bien longtemps d'un jour où je recevrai un signe de toi, d'un jour où nous serions à nouveau côte à côte, même si cela n'arrivera peut être jamais.
Je suis capable de rêver encore bien longtemps de  tout ce qu'il possible de faire dans une vie, même si des fois cela reste impossible.
je voulais juste te dire, qu'au bord de la route, un nomade, un promeneur, rêve de te voir t'approcher, aussi loin sois tu.
je connais le silence, je le connais par coeur,
mais du fond de mes rêveries, le silence aujourd'hui à des airs de cauchemard.

 

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